Édimbourg

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Nommer la magie

À quelques semaines d’intervalle, deux nouvelles petites-filles arrivent dans ma vie – Ursa et Iris. Elles ouvrent leurs yeux pleins de curiosité et je prononce : Ursa (l’ourse) et Iris (l’arc-en-ciel, ou la messagère). Reconnaissance.

Les noms d’Édimbourg sont eux aussi lourds de sens. La ville est « l’impératrice du Nord », « la vieille enfumée », elle est la rencontre hyperboréenne d’Athènes et de Sparte. Nous autres qui y vivons en sommes très fiers. Mais le nom de notre Édimbourg est-il un cafouillage, un lapsus, une duperie, ou encore une marque impériale ?

J’ai grandi avec l’histoire du bourg d’Edwin. Le bon roi saxon Edwin, venu au nord pour assujettir les grossiers et embarrassants Celtes, avait fondé sa nouvelle ville en tant que bastion de la civilisation anglaise.

Ce récit était devenu une sorte de statu quo assez pratique, mais il ne tenait pas la route, étant donné qu’Eidyn s’était installé ici bien avant Edwin. Din Eidyn était un ancien fort gallois ou celtique. En gaélique écossais, ça devient Dùn Èideann, par-delà les langues, et Dunedin en Aotearoa, par-delà les hémisphères.

Selon toute vraisemblance, Eidyn était un dieu ou un héros, mais il était peut-être un géant. Notre plus vieille histoire remonte à l’époque où ce paysage a été formé par une mère géante, une cailleach, qui s’était engagée dans une lutte titanesque de feu et de glace, se mesurant à son gargantuesque époux ainsi qu’à son enfant lanceur de rocher. Des millénaires plus tard, il ne reste de cette bataille que les collines et les vallées sur lesquelles Édimbourg a été érigée et desquelles elle retire son caractère – cette unité de lieu, qu’on reconnaît d’instinct. Par la fenêtre de ma maison, je rends grâce chaque matin à notre géant étendu de tout son long. J’aime l’idée de maintenir nos relations.

Trois collines principales forment le centre d’Édimbourg – Castle Craig (Eidyn’s Din), Calton Hill et Arthur’s Seat. Les peuplements humains ont germé sur ces vieux sédiments, géologiques, linguistiques et aujourd’hui littéraires. Mais qu’en est-il d’Arthur ? Une version romancée, venue plus tard, nous expliquait-on, alors que les rois d’Écosse aspiraient à un statut et à des manières chevaleresques. Mais Arthur était là bien avant sa propre légende médiévale. On retrouve des mentions du célèbre héros dans le plus vieux poème d’Écosse, Y Gododdin, écrit en gallois vers l’an 600. 

Cet Arthur-là fut d’abord un ancien dieu celtique. En tant que géant, il s’assoyait sur sa colline et tendait la main vers les cieux, pour toucher les étoiles, en particulier Arcturus, la gardienne des ourses. Et voilà que le mythe englobe la lumière et les ténèbres, l’hibernation hivernale et les cycles de la vie et de la mort présents dans la nature, l’organisation sociale, la religion. Ce n’est pas pour rien qu’on appelait les Celtes gallois « le peuple du Nord ».

Et comme l’ourse sommeille au fond de sa grotte, le mythique Arthur dort maintenant sous sa colline, à attendre notre signal en ces temps de péril. Ne nous reste plus qu’à espérer qu’il ne dormira pas trop longtemps. L’humanité doit chercher à comprendre les voies de la nature, tendre vers une conscience planétaire. Les marchands de mort impérialistes ont fait de leur pire. Et Édimbourg a un rôle à jouer, comme toutes les villes du monde, afin que la Terre se tourne vers une nouvelle lumière. 

Comme un géant, je berce Ursa, puis Iris, en leur souhaitant un climat sain de leur vivant. Mais elles sont le futur, notre avenir repose sur leurs épaules. Ursa, l’ourse, et Iris, la messagère de l’espoir.

Donald Smith

Cat Outram

Naming Magic 

In a space of weeks I have two new granddaughters – Ursa and Iris. They open clear inquisitive eyes, and I say “Ursa” (bear) and “Iris” (rainbow or messenger). Recognition.

The names of Edinburgh also carry a cargo of meaning. She is “Queen of the North”, “City of Enlightenment”, a hyperborean Athens and Sparta combined. We home-towners are very proud. But is our Edinburgh name a muddle, a slippage of tongues, a deceit, an imperial blot?

I was raised on the story of Edwin’s Burgh. Good Saxon King Edwin came north to subdue the uncouth and troublesome Celts, founding his new town as a bastion of English civilization.  

This became a convenient status quo story, but an unsustainable one, since Eidyn was here long before Edwin. Din Eidyn was a Cymric or old Celtic fort and settlement. That becomes Dùn Èideann in Scottish Gaelic, jumping languages, and Dunedin in Aotearoa, jumping hemispheres. 

Eidyn was most likely a god or hero, but perhaps he was a giant. Our oldest story is about how this landscape was formed by a giant mother, or cailleach, who tangled with her equally gargantuan consort, and her rock-chucking offspring, in a titanic contest of fire and ice. Millennia later this left the hills and valleys on which Edinburgh is built and from which it derives its character – a unity of place, instinctively recognisable. I look out my window each morning to acknowledge our recumbent giant. I like to keep up our connection.

There are three prominent hills in central Edinburgh – the Castle Craig (Eidyn’s Din), Calton Hill and Arthur’s Seat. Human settlement gathers on these ancient sediments, geological, linguistic and now literary. So, what of Arthur? A later romanticization, we were told, as Scottish kings aspired to chivalric manners and status. But Arthur was here long before his medieval legend. Y Gododdin, Scotland’s oldest poem, which was composed in Cymric about 600 CE,  mentions Arthur as an already famous hero.

This Arthur was first an old Celtic god. In giant mode he sat on his hill touching the heavens, in particular Arcturus, the bear star. Here the myth encompasses dark and light, the hibernation of winter, and the cycles of life and death in nature, social life and religion. The Cymric Celts were called “people of the north” for good reason.

As the she-bear slumbers in her cave, so the mythic Arthur now sleeps beneath his hill, awaiting our call in time of peril. We must hope he does not sleep too long. Humankind is struggling towards an awakening in nature’s pattern, a whole earth consciousness. The imperialist death dealers have done their worst. Now Edinburgh must play its part with cities worldwide, turning the planet towards new light. 

Like a giant, I cradle Ursa then Iris, desiring a healing environment in their lifetimes. Yet they are the future; we depend on them. Ursa, the bear cub, and Iris, messenger of hope.

Donald Smith

Artistes

Cat Outram, illustratrice (site, Instagram)

Donald Smith, auteur (site

 

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